Dans le cadre du séminaire « Médias et élections » organisé par la délégation de l’Union Européenne et le Conseil Supérieur de la Liberté de Communication au Congo, j’ai fait un retour sur l’expérience tunisienne, mais également sur mes expériences dans d’autres pays de l’Afrique notamment en Mauritanie.
Voir ici la charte des bonnes pratiques sur les médias sociaux dans un contexte électoral :https://issuu.com/nouhabelaid/docs/charte
Voici mon texte d’intervention :
Quelle couverture médiatique des élections à l’heure d’Internet et des médias sociaux ? cas de la Tunisie
Depuis le déclenchement du « printemps arabe » qui a engendré la chute du régime de Ben Ali, la scène médiatique tunisienne a vécu une réforme, et ce, avec l’abolition de certains anciens organismes médiatiques et institutions gouvernementales et l’apparition de nouvelles institutions de régulation des médias, notamment l’Instance Nationale pour la Réforme du domaine de l’Information et de la Communication (INRIC) et la Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle (HAICA). Il s’agit de « l’émergence d’un nouvel espace médiatique et d’un nouveau discours journalistique ».
De plus, nous ne parlons plus de médias étatiques mais plutôt de médias publics. Vu le rôle que jouent les médias dans le processus démocratique, après les événements de la révolution du 14 janvier 2011, un long débat a eu lieu sur ce passage d’une information gouvernementale à une information de service public. Jadis, Ben Ali utilisait les médias étatiques comme instrument de propagande politique et de désinformation ; mais pour instaurer un Etat démocratique, il a fallu rompre définitivement avec les anciennes pratiques du régime déchu qui consacraient la dépendance et la sujétion à l’égard du pouvoir.
En parallèle, le domaine des médias en Tunisie a vécu suite à l’évolution technologique progressive, plusieurs mutations techniques au point que la distribution télévisée se faisait via plusieurs supports grâce à la multiplication des canaux d’informations, ce qu’on appelle la convergence médiatique. Déjà placée sur le Net, la chaine publique tunisienne « Wataniya 1 » possédait déjà son site actualisé, sa page Facebook, son compte Twitter et sa chaine YouTube. A l’occasion des élections municipales en Tunisie, la Wataniya 1 a ajouté une nouvelle rubrique sur son site, intitulée « Municipales 2018 ». Il s’agit de la deuxième expérience de la télévision tunisienne, dont la première a eu lieu avec les premières élections présidentielles démocratiques en 2014. Bien que la HAICA n’a pas pris en 2014 en considération le contenu de la télé présent sur le web, En 2018, la nouveauté était que la HAICA, l’organisme de régulation, a étendu les critères d’objectivité et d’équité à tous les canaux de diffusion.
En effet, les pratiques journalistiques ont évolué en Tunisie depuis le 14 janvier 2011, date de la révolution tunisienne. De nombreux médias en ligne ont émergé et les médias traditionnels se sont trouvés appelés à marquer leur présence sur Internet. Pareillement pour les journalistes qui n’ont pas raté les opportunités de formation portant sur le journalisme web et les outils technologiques afin de suivre cette évolution. En Tunisie, Facebook est devenu même une source d’informations. Ce qui nous a appelé à travers l’Observatoire Arabe du Journalisme de rappeler les journalistes des bonnes pratiques sur Internet et les médias sociaux, notamment pendant les périodes électorales.
Par cette occasion, je partage avec vous les règles d’une charte de bonnes pratiques de la couverture des élections sur Internet et les médias sociaux :
1. Respecter les règles éthiques de la profession journalistique : exactitude, intégrité, impartialité, objectivité, indépendance et transparence.
2. Faire une distinction entre un journaliste professionnel et un journaliste citoyen (blogueur). En effet, un journaliste professionnel n’est pas autorisé à diffuser des informations sur Internet sans l’approbation de l’institution médiatique pour laquelle il travaille.
3. Utiliser toutes les plateformes en ligne disponibles pour couvrir les élections, et ce d’une manière professionnelle
4. Accorder à tous les candidats le droit de s’exprimer d’une manière égalitaire, à travers les plateformes électroniques des médias, dans un cadre d’impartialité et d’objectivité.
5. Éduquer le public sur son rôle pendant les élections et le renseigner sur les détails du processus de vote
6. Suivre le bon déroulement des travaux électoraux en temps réel dans les bureaux de vote et autres, et assurer toujours la mise à jour du contenu électronique des médias
7. Le journaliste ne doit être soumis à aucune sorte de pression (financière, physique, juridique, etc.) et ne doit pas recevoir de récompense financière pour promouvoir des candidats à travers les médias sociaux.
8. Faire une différence entre la propagande médiatique et le partage des informations médiatiques pour éviter de promouvoir les partis politiques par le biais des plateformes électroniques des médias.
9. Le journaliste devra séparer entre ses opinions personnelles et son devoir professionnel et éviter d’exprimer son opinion politique sur son propre compte dans les médias sociaux, surtout si cette opinion va à l’encontre de la ligne éditoriale du média dans lequel il travaille
10. S’assurer de l’authenticité des informations rapportées sur les médias sociaux des candidats et vérifier les publications sur les plateformes de médias sociaux via la principale source d’information.
11. Mentionner directement les sources d’informations disponibles sur Internet et sur les médias sociaux
12. Utiliser les applications en ligne pour vérifier les actualités et créer un contenu interactif
13. Respecter la vie privée des candidats aux élections et ne rien publier concernant leur vie personnelle sur les plateformes électroniques
14. Respecter le silence électoral dans l’espace virtuel des institutions médiatiques, pour garantir l’égalité des chances pour tous les candidats aux élections
15. Le respect ainsi de ces règles-là, mènera à une bonne couverture de l’élection prochaine au Congo.